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"Un mur de sable vient de tomber" de Virginie Yassef, du 1 décembre au 9 février, Noisy-le-sec

"Un mur de sable vient de tomber" de Virginie Yassef

 

 

 

 

 

 

 

Du 1 décembre 2012 au 9 février 2013
La Galerie
1 rue Jean Jaurès, Noisy-le-sec

Vernissage vendredi 30 novembre de 18h à 21h

Pour sa première exposition personnelle dans un centre d’art francilien, Virginie Yassef (née en 1970, vit et travaille à Paris) présentera un ensemble de nouvelles productions, aux côtés d’une œuvre issue de la Collection départementale d’art contemporain de la Seine-Saint-Denis.

« On aimerait prêter au mot déformation le double sens qu'il peut revendiquer […]. Il ne devrait pas seulement signifier : changer l'aspect de quelque chose, mais aussi : changer quelque chose de place, le déplacer ailleurs. » Ce double sens de la déformation, énoncé par Sándor Ferenczi en 1913, peut s’appliquer à cette exposition de Virginie Yassef tant elle y développe des formes transitoires qui sont les effets ou bien de transformations ou bien de transferts d’un contexte à un autre.

« Un mur de sable vient de tomber » engage d’emblée dans la perspective narrative où quelque chose s’est passé, à l’instant, sous nos yeux, presque sous nos pieds. Si d’après ce titre, l’événement est advenu de manière soudaine dans l’exposition, il se développe suivant une série de lentes métamorphoses : dans la vidéo Alloy (2007), un tas de petits volumes géométriques prend, sous les gestes patients d’un enfant, la forme d’un monument à l’équilibre précaire ; ailleurs, sur une scène, des sculptures deviendront autant d’accessoires d’un spectacle, voués à se transformer sous les manipulations habiles d’un autre enfant ; enfin, ce spectacle est la première étape d’un second qui aura lieu à La Ferme du Buisson, où l’enfant aura achevé sa mutation et sera alors devenu un chien…

La déformation, au sens de déplacement, peut qualifier le « salon de lecture » dans son ensemble : de son mobilier, à l’édition qui y est donnée à lire, aux Scénarios Fantômes (2003-2012). Les fauteuils sont les répliques de meubles à monter soi-même selon les plans conçus par Gerrit Rietveld en 1934 et intitulés crates (caisses), soulignant par là leur propension à circuler et leur qualité reproductible. Il s’agit là d’une forme de réactualisation autorisée, d’une citation historique marquée qui se serait adaptée à l’usage de ce « salon de lecture ». L’édition est aussi entièrement composée de citations isolées, faits relevés dans des journaux : de courtes phrases qui font immédiatement image flottent dans les larges pages blanches d’un journal, marquant ainsi l’absence du contexte d’origine dont elles sont extraites de manière irréversible. Autre forme de flottement, autre effet de recadrage : les Scénarios Fantômes – qui fonctionnent par séries de une, deux ou trois photographies – postulent, par leur titre commun, l’hypothèse d’un récit qui articulerait entre elles les quelques images qui les composent, sans autre indication d’un quelconque sens de lecture.

À ces formes de suspension du sens répondent des formes de suspensions physiques cette fois, qui touchent les sculptures : qu’elles soient régies par des forces d’attraction magnétique ou par des systèmes de contrepoids – comme pour la sculpture aérienne Airedificio (2007) – toutes génèrent des effets illusionnistes liés à des phénomènes physiques de forces contraires. L’instabilité du mur de sable qu’on imagine s’être répandu au sol en une infinité de grains, touche ainsi l’ensemble de l’exposition. Par ces suites de glissements, d’états transitoires, les œuvres demeurent indéterminées, à venir, en suspens, à l’image de la figure de l’enfant qui agit ici comme une promesse, un facteur de mobilité et de déformation, lui-même en mutation vers l’animal. Le phénomène de transition s’étend à l’échelle de l’exposition à La Galerie puisqu’elle est une première étape pour une autre exposition, à La Ferme du Buisson (du 21 avril au 27 juillet 2013) et porte ainsi, comme en sous-texte, la mention « à suivre… »

Émilie Renard